Par F.Guiot, dermatologue
La médecine esthétique ne cesse d’évoluer, de se spécialiser et de s’imposer. Par son sérieux, par son respect de la déontologie, et par ses formations continues, la Société Belge de Médecine Esthétique a tout mis en place pour que la médecine esthétique non chirurgicale soit élevée au rang de spécialité.
Le point sur les nouvelles technologies présentées lors du 27e congrès de la Société Belge de Médecine Esthétique (Bruxelles 28-29 avril 2017)
Phlébologie esthétique
Pour Alain Colignon, un bon examen repose sur l’analyse du reflux en Valsalva. S’il est négatif, il est conseillé de faire une transillumination et de déterminer le stade (Stade I : microsclérose, stade II : microsclérose ou phlébectomie, stade III : phlébectomie). S’il est positif avec un calibre > à 8 mm :nle traitement est chirurgical, s’il est < à 8 mm, une transillumination permettra de déterminer le stade et le traitement correspondant. Lors de sa présentation Jean Hébrant, le président du congrès a présenté les différentes complications de la sclérose. Les pigmentations sont présentes s’il y a eu une inflammation importante avec présence de sang dans le vaisseau. On fera si nécessaire une thrombectomie (très facile, avec une petite incision). L’hyperpigmentation peut se traiter par peeling au TCA. De petites nécroses sont des complications de la sclérose. Les varicosités rouges sont les plus résistantes à la sclérose.
Quels lasers pour les vaisseaux et lésions rouges?
Il existe différents types de lasers vasculaires selon la longueur d’onde émise : le laser KTP (532 nm), les lasers à colorant pulsé (585 à 595 nm), … Cette offre large permet de proposer un traitement dans différentes indications et plusieurs types d’anomalies vasculaires. Le choix d’une technique par rapport à une autre reste du ressort d’un médecin expérimenté, l’idéal étant de disposer de différentes techniques afin de choisir le traitement le plus adapté en fonction de l’indication a expliqué le Docteur David Michel.
Selon le stade de l’érythrose, on utilisera le laser KTP ou laser à colorant pulsé mais aussi le laser Nd à pulses longs et les lampes pulsées. Une seule séance de laser à colorant pulsé avec des pulses de 0.5, 1.5 ou 3 ms donne un bon résultat, c’est la technique de choix vu qu’on retrouve uniquement de petits vaisseaux au sein d’une érythrose (0.05 à 0.1 mm) ce qui représente un temps de relaxation thermique inférieur ou égal à 1.5 msec. On pourrait aussi utiliser les nouveaux lasers KTP ou les nouvelles IPL qui délivrent des pulses courts (3 ms) sur des surfaces importantes mais on ne sait pas si ces dernières techniques bénéficient d’une puissance crête aussi importante que le laser à colorant pulsé.
En bref on retiendra :
– Vaisseaux fins : pulses courts (0.5- 6 ms)
– Vaisseaux larges : pulses longs (10-40 ms)
– Vaisseaux plus profonds : le plus gros diamètre de spot + la plus grande longueur d’onde + des pulses longs combinés à un bon refroidissement
– Peaux mates : les longueurs d’onde les plus élevées+ les pulses les plus longs+ fréquences peu élevées + bon refroidissement
– Pas d’overlapping >10%
Une seule séance entraine déjà un bon résultat mais une deuxième séance améliore encore l’aspect final. En cas de refus du purpura par le patient, on utilisera des pulses plus longs (6 à 10 ms) mais cela nécessitera au moins 3 séances avec un résultat inférieur à la technique purpurique. La sclérothérapie reste le meilleur traitement pour traiter les varicosités des membres inférieurs. Les lasers sont à utiliser s’il existe une intolérance à la sclérose, ou un matting ou que la zone à traiter est très étendue. Les lasers YAG 1064 Long Pulse sont le traitement de référence des varicosités des membres inférieurs. C’est un laser polyvalent, couvrant une large palette d’indications. Sa grande profondeur d’action peut toutefois entraîner des dégâts non visibles dans les suites immédiates, ce qui implique une véritable expertise de son utilisateur. Il émet un faisceau d’une longueur d’onde de 1064 nm peu absorbé par l’oxyhémoglobine et par la mélanine, mais qui présente une bonne profondeur de pénétration cutanée ce qui est un avantage, mais aussi un inconvénient lorsqu’on ne maîtrise pas cette technique.
Le laser YAG 1064 est tout particulièrement indiqué pour le traitement des varicosités des membres inférieurs, surtout lorsqu’elles sont bleutées et de diamètre >1 mm
Ses indications sont limitées lorsqu’il s’agit de vaisseaux rouges et très fin de type « matting ». Il en est de même pour certains lasers KTP (532NM). De plus les diamètres de spot étant relativement petits, ces traitements sont chronophages. Une solution est d’utiliser une double longueur d’onde : laser à colorant pulsé et YAG 1064 LP. Concrètement, un premier tir est délivré par le laser à lorant pulsé sur la varicosité et transforme l’oxyhémoglobine en méthémoglobine qui devient une cible pour le YAG. Cela permet une destruction plus complète du vaisseau et une atteinte vasculaire plus profonde.
Pour couperose et télangiectasies faciales :
– 1er choix : laser colorant pulsé (LCP), KTP, IPL (+ risqués : yag 1064, diode, Alexandrite). 50 à 90% d’amélioration en 1 à 3 séances, espacées de 1 à 2 mois.
Faire spot test sur zone périphérique.
– Choix du KTP (532 nm) : pour vx bien individualisés avec peu d’érythrose associée. Peu douloureux. Œdème 3 jours pour les couperoses importantes.
– Choix du LCP(595 nm) : très bien pour fins vx. Très purpurique sur vx fins (utilisé des pulses courts). Pour vx plus larges : plusieurs passages subpurpuriques (20 ms).Pour erythrocouperose
(télangiectasies et érythème diffus) :
– Rosacée : LCP ou KTP ou IPL. (Yag peu performant)
– Erythrose pure : LCP et IPL (1er filtre à 560)
– Intérêt d’associer les techniques : ex : alternance de KTP puis LCP.Pour erythrosis coli
– 1er choix : LCP, 3 séances espacées de 2-3 mois. PAM 10 mm, 0.5 ms/ 4 à 5 j
Les progrès technologiques progressivement apportés aux lasers vasculaires permettent aujourd’hui de réduire le nombre et la durée des séances. Savoir choisir la bonne technique en fonction de la lésion à traiter est une affaire de spécialiste.
La médecine esthétique à domicile : les home-device (HD)
Les HD sont un marché en plein développement : 1.9 milliards au niveau mondial mais on l’estime à 3 milliards en 2020. Les tendances sont très variables selon les continents : en Europe :
c’est surtout les HD d’épilation qui attirent les patients, aux USA, les HD nettoyage et peeling, en Corée, les HD anti-âge. Le principe de fonctionnement de ces appareils essaye de reprendre celui qui est utilisé chez les médecins par des technologies dont l’efficacité n’est plus à prouver. L’éventail de ces HD inclut de vrais petits lasers et des lampes pulsées (I.P.L.). L’argument commercial, dans le cas des HD, met en avant des longueurs d’onde efficaces sur le poil, une facilité d’emploi à domicile et un prix attractif. Globalement les études cliniques faites par les sociétés de HD sont mal faites, pas en double aveugle, sur peu de patients, sponsorisée par la marque. Les effets secondaires de ses HD sont peu nombreux.
Peu de systèmes ont fait l’objet d’évaluations cliniques avec des publications dans des revues à comité de lecture.
Une publication (Town GA Cosmetic Laser Therapy 2007) a analysé les notices et les appareils, et le constat est sans appel :
– Il existe des différences importantes d’une lampe flash à l’autre sur le plan de la distribution spectrale de la lumière émise.
– L’étude de l’émission spectrotemporelle montre que certaines I.P.L. ne délivrent leur énergie effective que pendant un cinquième de leur durée d’émission.
– Certaines machines émettent une fluence trop basse pour entraîner un effet thérapeutique
La situation réglementaire de ces systèmes est confuse, mais l’irruption de « grandes » marques dans le marché de la consommation va augmenter la sensibilisation du grand public aux dispositifs lasers et lampes pulsées pour l’épilation.
A terme ces HD remplaceront peut-être certains actes médicaux à faible valeur ajoutée mais n’auront jamais la même puissance que ceux des professionnels de la santé. Vu leur faible efficacité, ils ne représentent guère une menace pour les dermatologues. Au contraire, déçus par leur HD, les patients auront tendance à se tourner vers nos machines plus performantes.